Une tombe grande comme un village

Le week-end, j'ai visité un lieu que j'aimerais vous présenter ici. J'en avais déjà entendu parler, mais ne m'imaginais pas l'effet que pouvait faire sa visite. Ce lieu est un bouleversant témoignage de la seconde guerre mondiale, et c'est bien bouleversé qu'on ressort d'Oradour-sur-Glane. Au panneau annonçant l'entrée dans Oradour-sur-Glane, on a ajouté trois mots : « Souviens-toi - Remember ». Ce qu'il est impossible de ne pas faire une fois à l'intérieur. Tout y trahit la trace du crime qui y fut commis. A l'approche de l'été 1944, le village se trouvait sous occupation allemande. Le 10 juin arrivèrent des hommes de la 2e division blindée SS, Das Reich. Agissant d'après des informations selon lesquelles Oradour était impliqué dans des activités de résistance, les troupes allemandes rassemblèrent les villageois sur le champ de foire, avant de les répartir dans une demi-douzaine de granges et de les y garder sous la menace des armes. Les femmes et les enfants furent entassés dans l'église et le massacre commença. Une bombe à gaz asphyxiant explosa dans la nef, des tirs de mitrailleuse et des grenades achevèrent son oeuvre. Les hommes retenus dans les granges furent eux aussi mis à mort. Après le massacre, le village fut incendié. En tout, ce furent 642 personnes qui périrent, dont 200 enfants. Seuls une femme âgée et cinq hommes survécurent. L'officier responsable de cette boucherie fut tué en opération, en Normandie, moins de trois semaines plus tard. Après la fin de la guerre, il fut décidé qu’Oradour- sur-Glane ne serait pas reconstruit, et Jacques Chirac le déclara village martyr en 1999. Aujourd'hui, ses maisons privées de toit et les carcasses de voitures carbonisées abandonnées dans ses rues portent témoignage d’une atrocité innommable, qui choqua même les SS. Entre le champ de foire et le cimetière du village en ruine se dresse aujourd’hui le Centre de la mémoire, construit en 1974. On peut y lire les noms des martyrs et s’y recueillir devant de poignants souvenirs : une montre cassée, une carte d’identité, un jouet... Pour la petite histoire, le nom d'Oradour vient du latin oratorium. Il suggère que le village s’était jadis assemblé autour d'une chapelle où l‘on venait prier pour ses morts. Par une tragique ironie, Oradour a finalement retrouvé ce statut de sanctuaire. J'ai trouvé cette destination insolite sur un blog compilant des idées de voyages insolites. Je vous invite à le découvrir, si vous êtes, comme moi, toujours en quête d'insolitude (d'insolite et de solitude, comme vous l'aurez très certainement compris) : c’est voyage insolite.